Cet après-midi d'échange avec l'activiste visuel.le et photographe sud-africain.ne a lieu après leur première rétrospective, organisée à la Maison européenne de la photographie (MEP) en collaboration avec la Tate, à Londres, le Gropius Bau, à Berlin, et le Bildmuseet de l'université d'Umeå. À Paris, cette rétrospective a accueilli plus de 80 000 visiteurs et est l'exposition la plus visitée de l'institution pour un.e artiste s’identifiant en tant que personne noir.e ou queer.
Né.e en 1972 à Umlazi, le travail de Zanele Muholi est profondément lié à la défense de la communauté LGBTQIA+. Muholi a étudié la photographie avancée au Market Photo Workshop de Newtown, à Johannesburg, et a obtenu en 2009 une maîtrise en beaux-arts sur les médias documentaires à l'université Ryerson de Toronto. Leur travail a été exposé à la Documenta 13, au pavillon sud-africain de la 55ème Biennale de Venise et à la 29ème Biennale de São Paulo. Des expositions individuelles ont eu lieu dans des institutions telles que le Stedelijk Museum d'Amsterdam, les Gallatin Galleries de New York, l'Open Eye Gallery de Liverpool, le Brooklyn Museum de New York, le Kulturhistorisk Museum d'Oslo, le Schwules Museum de Berlin et la Casa Africa de Las Palmas.
Muholi a produit de nombreuses séries photographiques qui étudient l'écart, dans l'Afrique du Sud post-apartheid, entre l'égalité promue par la constitution du pays et l'intolérance et les actes violents qui visent les membres de la communauté LGBTQIA+. L'artiste a cofondé le Forum for the Empowerment of Women en 2002 et Inkanyiso, un forum pour les médias queer et visuels, en 2009. La mission autoproclamée de Muholi est de "réécrire une histoire visuelle noire queer et trans de l'Afrique du Sud pour que le monde connaisse notre résistance et notre existence au plus fort des crimes de haine en Afrique du Sud et au-delà".
En 2012, Muholi a inauguré sa première exposition personnelle en France à L'Espace Canopy, à l'invitation du collectif Les dégommeuses. C'est la même année que Muholi a amené son équipe de football Thokozani Football Club à jouer dans un tournoi contre l'homophobie au stade du Parc de Prins, à Paris. Le Thokozani Football Club porte le nom d'une joueuse de football lesbienne qui a été brutalement tuée à Durban en 2011.
Dans une série plus récente, Somnyama Ngonyama (Hail the Dark Lioness), Muholi devient à la fois le participant et le créateur d'images, en tournant la caméra sur ellui-même. Expérimentant différents personnages et archétypes, les autoportraits de Muholi font référence à des événements spécifiques de l'histoire politique de l'Afrique du Sud. En exagérant la noirceur de son teint, iels se réapproprient sa noirceur et contrebalancent les images culturellement dominantes des femmes noires dans les médias d'aujourd'hui. Certains des autoportraits de cette série ont été réalisés lors de leur résidence à la Cité internationale des arts en 2014.