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Ninon Lacroix

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ENTRETIEN

 

Dans le cadre de votre résidence à la Cité internationale des arts, en partenariat avec la Fondation Culture & Diversité, vous avez bénéficié d’un accompagnement à la création par des commissaires indépendantes membres de C-E-A / Association française des commissaires d'exposition. Pouvez-vous nous dire en quoi cet accompagnement a nourri votre pratique ? 

Le travail avec les commissaires m’a permis d’approcher les enjeux de construction d’une exposition et de production vidéo dans le cadre d’une exposition, ce qui était très nouveau pour moi et a ouvert beaucoup de possibles dans ma pratique. L'accompagnement a principalement consisté à penser l'exposition Faire danser les ours présentée dans le cadre du Festival des Traversées de Marais. La particularité de ce travail était que nous pensions à l’exposition en même temps que je produisais les objets qui y seraient montrés. Ceci a bien sûr beaucoup alimenté ma production;  j’ai pu me concentrer sur des questions très concrètes, qu’est ce qui va exister, comment, ce qui m’a permis de préciser mes intentions de manière plus générales. J'ai beaucoup apprécié cela, d'autant que je n’avais jamais eu l’occasion auparavant, de mener à bien un projet personnel jusqu'à sa production finale avec d’autres professionnelles toutes très qualifiées."

 

 

Vous inaugurerez une exposition à la Cité internationale des arts en septembre 2023 à l’occasion du festival des Traversées du Marais. Comment ce projet s’est-il développé et en quoi celui-ci s’ancre dans votre projet de résidence ? 

"Mon projet de résidence portait la production d’installations à partir d’un projet de film, plutôt destiné au cinéma, autour du langage et des récits amoureux. J’ai filmé pendant deux ans le discours et les gestes d’enfants en école maternelles et primaires à Paris pour traiter ce sujet. J’ai plutôt une démarche documentaire. L’année dernière, alors que je bénéficiais d’une résidence en écriture à Périphérie, la forme que je développais, tant au niveau de la narration que de l’expérience que je voulais transmettre, m’a peu à peu conduite vers l’installation. C’est ce que j’ai voulu explorer au sein de la résidence à la cité des arts. Le projet d’exposition s’inscrivait parfaitement dans ma recherche d’alors; comment produire des vidéos pour un espace d’exposition, comment penser le montage dans l’espace, via plusieurs écrans, et la possibilité d’une déambulation.

J'ai passé un certain temps à revenir sur les images filmées et les sons enregistrés, mais également sur les différents objets que j'avais récoltés dans les centres de loisirs; dessins, photo, mots d'amour et lettre. Il a fallu opérer un tri dans cette matière assez vaste. Puis j'ai testé des agencements via le montage vidéo en même temps que j'explorais des manières de projeter dans l'espace et sur différents supports."

 

 

Avez-vous d’autres projets en cours ou futurs ?

"J’aimerai bien évidemment poursuivre ce projet là et donner une forme finale à la fois aux installations et au film. En parallèle, d’autres projets se concluent peu à peu à la rentrée. J’ai travaillé une série photographique avec trois chercheur.se.s en science sociale de l’Institut Convergence Migration sur la complexité de l’habiter des exilé.e.s. Les photographies ont majoritairement été prises à la chambre photographique et dépeignent les différentes structures «accueillantes» ou prétendument hospitalière dans la ville, que ce soit les espaces intimes intérieurs ou ceux extérieurs et publics. Ce travail fera l’objet d’une exposition en octobre à la maison de l’architecture à Paris. Enfin, je suis en train de finir  une installation vidéo qui sera présentée à la Maison Salvan à Toulouse en octobre également, dans le cadre de l’exposition L’eau qui fend la pierre avec l’herbe de David Ryan. Elle est conçu comme une encyclopédie de gestes de soins et d’attentions quotidiennes pratiqués à Belfast, majoritairement par des personnes qui s’identifient comme femmes. Ces gestes sont autant d’héritages de manières de résister et lutter qui sont souvent tues et dévalorisées. L’envie, en les archivant est de montrer leur puissance et leur particularité: j’ai eu la chance de travailler avec Oona Doherty pour interpréter certains gestes."

 

 

BIOGRAPHIE

 

Ninon Lacroix est photographe et réalisatrice. Elle a participé au programme Égalité des Chances à l'ENS Louis-Lumière en 2017, alors qu’elle était sur le point de valider sa licence de philosophie à PSL / Lycée Henri IV - ENS Ulm. Elle intègre par la suite le Master de Photographie de l’École Nationale Supérieure Louis-Lumière, option Procédés alternatifs, animer l’image fixe, portraits à la chambre photographique, dont elle sort diplômée en 2022, formation qu’elle complète par le Master Documentaire de création option Réalisation, qui émane d’un partenariat entre l’École documentaire de Lussas et Université Grenoble Alpes. Durant ses études, Ninon Lacroix a bénéficié des bourses de la Fondation Culture & Diversité ainsi que de la bourse de Prime Video.
 

Par l’intermédiaire du médium filmique, du documentaire ainsi que de la photographie, le travail de Ninon Lacroix s’intéresse aux conventions amoureuses et à la notion de genre. Dans le cadre de la Résidence C&D, elle envisage de produire un dispositif audiovisuel visant à explorer une forme d’imaginaire qui suggèrerait une forme de subjectivité par le déploiement de l’espace mental comme un paysage extérieur. La collecte d’une matière vaste et protéiforme, composée de montages, d’entretiens, de mises en scène, de portraits et de dessins accompagnés de leur description audio, s’exposerait sous la forme d’une installation immersive qui proposerait au spectateur·rice de traverser le dispositif comme l’on traverserait l’inconscient d’un individu.

 

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