arts plastiques

Charlie Malgat

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La pratique artistique de Charlie Malgat se développe depuis plusieurs années autour d’une véritable obsession pour le vivant : "ce qui se meut, danse, convulse, se modifie puis mute pour rester en vie". Le corps (humain/ non-humain) est son terrain d’expérimentation : elle l’étudie, l’examine, le dissèque puis le réanime - mettant en scène des organes et bouts de chair chorégraphiés, transcendés dans un univers fictionnel immersif emprunt d’humour et de poésie, à la fois sensuel et trivial.

 

Utilisant tour à tour la vidéo, la sculpture, le son ou le dessin, chaque médium nourrit et complète les diverses facettes d’un monde virtuel où se baladent allègrement, un donut anthropomorphe (Agony, 2020) une paire de fesses sonores (Les fesses qui chantent, 2019), une bouche bée jusqu’à la luette (Out, 2018), des organes dans un dernier frisson de vie (Extracting Organs, 2018) ou encore un steak synthétique, cultivé en laboratoire, livrant ses états d’âme (HD STEAK , Monocellular Spleen, 2016). Chaque oeuvre déploie de façon métonymique une partie d’un corps en un système autonome, animé par une force vitale qui palpite et qui gronde faisant surgir des sentiments originaux. L’émancipation de ces ‘objets sensibles’ se constituent dans un jeu de va-et-vient entre intériorité et extériorité, certains objets étant littéralement “fourrés” (‘stuffed sculptures’, terme employé par l’artiste) d’une matière prête à jaillir.

 

Les sculptures de Charlie Malgat, comme l’ensemble de son oeuvre, interrogent notre rapport à l’art et à ses objets que nous consommons. L’envie d’insuffler la vie, de créer une sculpture vivante, dotée d’intentions propres et donc d’une mise action, place l’artiste dans une généalogie qui a travaillé le corps et l’objet comme systèmes autonomes égaux : le corps devenant objet et l’objet devenant humain. Nous sortons du cadre d’un art de la mimesis ou de la représentation, pour entrer dans un art libérateur qui prenant le corps comme objet affranchi de toutes ses fonctions naturelles peut laisser la place à l’indéterminé, l’indiscipliné et l’involontaire.

 

C’est donc dans une altérité non subjective, vers un autre émancipé, que prend forme l’art de Charlie Malgat, qui par la tribulation de ses objets vivants nous amène à regarder l’intérieur des systèmes qui nous entourent, souvent intoxiqués, qui échouent et se régénèrent à l’infini.

 

 – Sophie Delhasse

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